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Lucille la luciolle
20 septembre 2010

CHAPITRE 2 - QUAND LA GRAND-TANTE AGATHE ATTEND LUCILLE-

 

Tandis que Jeanne et Lucille, encore secouées par quelques soubresauts de l’antique véhicule, se dirigent vers l’aérodrome, à Paris, Agathe est assise dans son salon.

Agathe, la grand-tante de Lucille, la sœur de Marie, est une femme distinguée qui semble sans âge. Fine, mince, digne, elle est aussi dynamique et intemporelle. Elle se méfie de tout et de tout le monde. C’est une déformation professionnelle : elle est retraitée d’une brillante carrière d’espionne. Depuis maintenant 20 ans elle vit recluse en ermite dans un immense appartement parisien qui occupe le dernier étage d’un immeuble dont elle est l’unique propriétaire. Jeune veuve, elle est handicapée des jambes depuis l’accident de voiture qui a aussi couté la vie à son mari. Inventeur de génie et chef d’entreprise avertie, Agathe a su faire de bons placements lors de l’explosion de l’informatique dans les années 70. Aujourd’hui elle est riche, mise à l’abri du besoin jusqu’à la fin de ses jours.

Avec le temps, en plus d’être de nature paranoïaque, elle est devenue obsédée par tout ce qui touche à la pollution. Tout ce qui agresse l’air, la faune ou la flore de notre planète la concernent directement. Son domicile, le mieux équipé en matière de son et vidéosurveillance, est ainsi devenu l’un des endroits les plus écologiques de la capitale. Elle a un œil sur tous les pics de pollution du pays et du reste du monde et sur tous ceux qui pénètrent dans son immeuble. Toutes les agences de presse mondiales sont reliées à son ordinateur central qui lui-même est en connexion avec certains satellites d’informations. Tous les étages de l’immeuble sont équipées de caméras se surveillance. Les services secrets du pays sont au courant, mais cette dame un peu excentrique fait partie de « la maison ». La police est au courant mais ne s’en plaint pas puisque cet immeuble n’a pas à redouter les cambriolages. Dans le monde de l’espionnage ou chez elle, Agathe garde un œil sur tout !

John, un des responsables des services secrets anglais connu uniquement sous ce nom, est un vieil ami avec qui elle entretient une communication régulière, personnelle et amicale. Mais uniquement par écran interposé. Il ne se déplace plus jamais de Londres et elle ne sort jamais de son appartement. Toute personne désirant y accéder doit y être conviée pour une raison précise. La majorité des visiteurs est là pour accomplir une tâche ou un service. Coiffeur, esthéticienne, médecins et spécialistes, kinésithérapeute et masseur, entraîneur sportif, fleuriste, décorateur, libraire, cuisinier, femme de ménage et tous les trois ans, l’entrepreneur, doivent avoir pris rendez-vous pour pénétrer dans son antre fermé d’une porte blindée. Seul Jules, homme de terrain envoyé par « John », possède l’autre carte magnétique qui en commande l’ouverture. A son service depuis 20 ans, Agathe l’a en très haute estime et le considère comme un membre de sa famille, puisqu’elle n’était plus en contact, ni avec sa sœur, ni avec sa petite-nièce.

Sa sœur Marie qui la tient pour responsable de la mort de sa fille, Laura, maman de Lucille, a coupé les ponts depuis 10 ans. De ce jour Agathe n’a eu de cesse de prouver que M.A.L. en est le véritable responsable. Tellement convaincue de son bon droit, Agathe ne réalise pas que Marie a surtout le désir de protéger la petite dernière de cette tradition familiale qui veut que toutes les femmes de la famille soient des espionnes handicapées ou… mortes !

Le salon d’Agathe est peu conventionnel c’est le moins que l’on puisse dire. Il est équipé sur tout un mur d’une multitude d’écrans. Ecrans de surveillance en noir et blanc, écrans de télévision qui encadrent, eux-mêmes un écran géant. Autant de lucarnes qui lui permettent d’avoir un œil sur tout et sur tout le monde. Différents ordinateurs et télescripteurs complètent ses possibilités de se tenir informée. Son bureau d’une longueur de trois mètres est une véritable table de contrôle qui ferait pâlir de jalousie n’importe quel directeur d’agence de communication. Sur un des écrans, le journal télévisé diffuse un reportage. La voix du journaliste se veut alarmante :

« Garanti trois siècles, le Centre de Stockage de La Manche fuit déjà. Les déchets nucléaires tels que le plutonium perdent la moitié de leur radioactivité au bout de 24000 ans ! 300 ans pour les déchets radioactifs dits de « vie courte» !

Retraiter n'est pas recycler ! Quelles sont les pistes de recherche actuelles ?

La séparation des radioéléments, la transmutation et enfin l'incinération dans des réacteurs spéciaux à construire.

Ces solutions, si elles aboutissent un jour, ne seront pas disponibles avant des dizaines d'années. Sans parler des sommes astronomiques qu'elles engagent.

En attendant ces hypothétiques solutions, la loi Bataille prévoit d'entreposer provisoirement ou de stocker définitivement les déchets en fonction de leur dangerosité : soit en surface, soit en grande profondeur, entre 600 et 800 mètres, soit, idée plus récente, en « sub-surface » à 15 ou 20 mètres de profondeur. »

Agathe soupire et baisse le son. D’abord assise devant un mini laboratoire qui contient éprouvettes et flacons de produits dangereux ainsi que tout un équipement très pointu, elle glisse ensuite sur le prolongement du bureau jusqu’à ses claviers d’ordinateurs, face à ses écrans. Du bout du doigt sur l’accoudoir de son fauteuil, elle prend une ligne téléphonique dont la tonalité se répercute sur les enceintes du salon.

On décroche à la 2ème sonnerie. John, son ami anglais, apparait sur l’écran principal et central du mur d’images. Leurs salutations amicales et polies sont vite suivies d’une conversation houleuse. Agathe cherche toujours des preuves contre cet homme, Marc-Auguste Lamproie ! Non ! Elle ne sera jamais à la retraite ! Sa croisade est affaire de justice et n’est pas personnelle ! Même si elle remonte au père Lamproie déjà dans les pesticides après la guerre. Depuis la fin de la guerre froide, John et elle travaillent à protéger les êtres humains des effets néfastes de la mondialisation telle que la pollution. Marc-Auguste Lamproie  dit « M.A.L. » est néfaste ! Dans trois jours, il doit signer un très gros contrat européen de recyclage de plastique. Agathe doit l’en empêcher ! Elle manipule son clavier et sur un autre écran près de l’image de John apparait une suite de reportages et de photos de la police criminelle qu’elle commente pour lui.

- Et l’incendie de l’usine de pesticides l’été passé ? Un accident ? Je n’y crois pas ! Tout comme l’accident de voiture de Laura tandis qu’elle rapportait des preuves contre lui. Grâce à son décès M.A.L. a fait fortune avec le stockage de déchets nucléaires avec ses futs dans La Manche qui devaient durer trois siècles et qui fuient déjà.

            - Mais puisque maintenant il fait dans l’écologie ! S’exclame John. Il argumente et tente une fois de plus de calmer la colère de sa vieille amie Agathe.

- M.A.L. dans le recyclage plastique ! Agathe rit jaune.

Elle n’y croit pas. Elle n’a aucune confiance en cet homme. Un « bip-bip » se fait entendre. Agathe décroche un téléphone manuellement. C’est Jeanne. Lucille est dans son avion Cessna, ils ne vont pas tarder. John attend avec impatience sur l’écran principal qu’Agathe lui dise ce qu’il en est. Quand elle raccroche, John demande des nouvelles de sa sœur Marie et s’interroge sur le fait qu’elle ne se rende pas à son chevet. Mais Agathe lui rappelle que Marie ne veut plus la voir. Elle lui a envoyé les meilleurs médecins de sa connaissance. Et puis Lucille a besoin d’elle. Quelqu’un doit s’en occuper. Agathe est toute excitée à l’idée de recevoir « la petite » et c’est encore l’occasion d’un désaccord entre eux. John s’inquiète.

- Et s’il lui arrivait quelque chose…

Cette famille est en danger constant depuis des années à cause de « leurs activités » d’espionnage. Toutes les femmes de la famille ont eu à payer un lourd tribut et ce depuis Mata Hari ! C’est une triste tradition familiale !

- Justement !

Agathe considère qu’elle n’a pas d’autre choix que de former Lucille afin de prendre la relève pour protéger la planète. John lui rappelle sa jeunesse et pourquoi sa sœur Marie ne veut plus la voir. Elle désapprouve l’influence qu’Agathe a sur ses proches. Comme celle qu’elle a eue précédemment sur Laura, la mère de Lucille, morte de manière suspecte dans cet accident de voiture. Agathe ne peut pas protéger tout le monde.

- Il y a déjà eu trop de dommages collatéraux ! tonne John.

Agathe ouvre ses tiroirs pleins de gadgets et montre ensuite d’un large signe du bras ses claviers et ses écrans. Aujourd’hui elle a tout ce qu’il lui faut pour les protéger ! Sur l’écran John s’énerve.

- Lucille a déjà largement payée sa part. Il tape du poing sur son bureau avant de raccrocher.

L’écran passe au noir avant de recommencer à diffuser des journaux télévisés.

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Commentaires
C
j'adore, mais j'ai pas tout compris
Lucille la luciolle
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